Les mangroves, ces forêts marécageuses situées le long des côtes haïtiennes, constituent un véritable rempart naturel. Elles protègent les rivages contre l’érosion, servent de nurserie à de nombreuses espèces de poissons et atténuent l’impact des ouragans. Pourtant, cet écosystème vital, que les pêcheurs appellent familièrement « mang », disparaît à un rythme alarmant.

Dans plusieurs communes côtières, les coupes illégales se multiplient. Des pans entiers de mangroves sont arrachés pour faire place à des projets immobiliers privés ou à des exploitations de sable et de bois. Des habitants pointent du doigt la complicité ou l’inaction de certaines autorités locales et étatiques, accusées de fermer les yeux sur ces pratiques ou même d’en tirer profit. Cette course à la fortune immédiate laisse la biodiversité dévastée : les poissons, privés de leur abri naturel pour la reproduction, se raréfient dangereusement.
Les conséquences se répercutent directement sur les communautés de pêcheurs. Jadis florissante, la pêche artisanale se trouve aujourd’hui marginalisée. Faute de ressources proches des côtes, les pêcheurs sont contraints de s’aventurer toujours plus loin au large, augmentant leurs frais de carburant et les risques en mer. Beaucoup abandonnent peu à peu ce métier, pourtant considéré comme l’un des secteurs d’activité les plus prometteurs pour l’économie nationale.
Des spécialistes de l’environnement rappellent que la mangrove agit comme une barrière contre les tempêtes et qu’elle absorbe d’importantes quantités de carbone, un rôle essentiel face aux changements climatiques. Sa destruction accentue la vulnérabilité d’Haïti, déjà durement touchée par les catastrophes naturelles.
Des initiatives de reboisement existent, soutenues par certaines organisations locales et internationales. Mais elles peinent à compenser l’ampleur des dégâts sans un engagement ferme de l’État. La protection des mangroves ne peut plus attendre : il en va non seulement de la survie de la pêche artisanale, mais aussi de la sécurité alimentaire et de l’équilibre écologique du pays.
Préserver ces forêts côtières, c’est défendre un patrimoine commun et assurer l’avenir des générations haïtiennes.