La capitale malgache a été le théâtre de violentes manifestations jeudi contre les coupures répétées d’électricité et les pénuries d’eau, plongeant la ville dans un climat de chaos. Face à l’ampleur des troubles, les autorités ont imposé un couvre-feu nocturne, en vigueur jusqu’à vendredi matin.
Des centaines de personnes sont descendues dans les rues d’Antananarivo pour dénoncer des coupures de courant qui privent régulièrement ménages et entreprises d’électricité pendant plus de douze heures. Les rassemblements, pourtant interdits la veille par le préfet, ont rapidement dégénéré. Les forces de l’ordre ont répliqué aux protestataires par des tirs de balles en caoutchouc et des grenades lacrymogènes.
Au fil de la journée, les tensions se sont accrues : pillages de commerces, incendies de domiciles appartenant à des parlementaires proches du pouvoir, caillassages de pompiers en intervention. Même une station du téléphérique, symbole d’un projet présidentiel controversé, a été prise pour cible. À la tombée de la nuit, les violences se poursuivaient dans plusieurs quartiers, sans présence sécuritaire visible.



Dans une mise en scène inédite, certains manifestants arboraient le drapeau pirate popularisé par la série japonaise One Piece, devenu ces dernières années un emblème de contestation en Asie et ailleurs. La mobilisation avait largement été relayée sur les réseaux sociaux.
Le président Andry Rajoelina, réélu en 2023 lors d’un scrutin boycotté par une partie de l’opposition, se trouvait à New York pour l’Assemblée générale de l’ONU et n’avait pas encore réagi jeudi soir. Pendant ce temps, la préfecture a ordonné la fermeture de toutes les écoles vendredi, et un vol d’Air France a dû être dérouté vers l’île Maurice.
Reporter sans frontières a dénoncé des violences policières visant au moins trois journalistes, appelant les autorités à identifier les responsables.
Dans ce pays où près de 75 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, selon la Banque mondiale, la crise énergétique s’ajoute à un profond malaise social. Les scènes de colère observées à Antananarivo illustrent la fragilité d’une société à bout de patience, où chaque nouvelle coupure d’eau ou d’électricité devient l’étincelle d’une contestation plus large contre le régime en place.