Ce mercredi 28 mai 2025 marque la fin officielle du mandat d’Elon Musk à la tête du Département de l’efficacité gouvernementale (DOGE), une initiative phare de l’administration Trump visant à réformer la bureaucratie fédérale américaine. Nommé en novembre 2024 aux côtés de l’entrepreneur Vivek Ramaswamy, le milliardaire, PDG de Tesla, SpaceX et X, avait suscité de grandes attentes avec sa promesse de réduire les dépenses publiques de 2 000 milliards de dollars et de révolutionner la gestion gouvernementale. Alors que son rôle s’achève, le bilan de son passage reste mitigé, oscillant entre ambitions audacieuses et résultats limités. Retour sur une expérience qui a marqué les premiers mois du second mandat de Donald Trump.
Une mission ambitieuse pour transformer Washington
Annoncé comme une réponse au « gaspillage » et à la bureaucratie fédérale, le Département de l’efficacité gouvernementale (DOGE) n’était pas une agence gouvernementale formelle, mais un organe consultatif chargé de fournir des recommandations à la Maison Blanche. Sous la direction de Musk et Ramaswamy, il visait à réduire les réglementations excessives, éliminer les dépenses inutiles et restructurer les agences fédérales. Donald Trump, dans un parallèle audacieux, avait comparé cette initiative au Projet Manhattan, promettant une transformation radicale du fonctionnement du gouvernement d’ici au 4 juillet 2026, date du 250e anniversaire de la Déclaration d’indépendance.
Musk, connu pour son approche disruptive dans le secteur privé, s’est engagé avec un enthousiasme caractéristique. Sur X, il a promis une transparence totale, annonçant que toutes les actions du DOGE seraient publiées en ligne et proposant même un classement des « dépenses les plus insensées » des contribuables. Il a également appelé à une réduction drastique du nombre d’agences fédérales, suggérant de passer de plus de 400 à seulement 99.
Des réalisations partielles face à des obstacles majeurs
Malgré ces ambitions, les résultats concrets du DOGE sous la direction de Musk ont été en deçà des attentes. Parmi les réalisations notables, le DOGE a lancé une revue des dépenses fédérales, identifiant environ 236 milliards de dollars de paiements inappropriés, selon un rapport du Government Accountability Office. Des recommandations ont été soumises pour réformer les paiements Medicare et optimiser certains processus réglementaires, avec un potentiel d’économies estimé à près de 200 milliards de dollars sur une décennie.
Cependant, les objectifs de réduction budgétaire massive – jusqu’à 2 000 milliards de dollars – se sont heurtés à des réalités politiques et logistiques. Selon des experts, couper un tiers du budget fédéral (6,8 trillions de dollars en 2024) nécessiterait des réductions drastiques dans des programmes populaires comme la sécurité sociale ou Medicare, une démarche politiquement risquée que même un Congrès républicain pourrait hésiter à soutenir. De plus, l’absence d’autorité formelle de Musk et Ramaswamy, qui agissaient comme conseillers sans pouvoir décisionnel direct, a limité leur impact.
Musk a également suscité la controverse en ciblant des agences comme l’USAID et le Consumer Financial Protection Bureau pour une suppression totale, provoquant des protestations de la part des employés fédéraux et des critiques de syndicats, qui ont accusé le milliardaire de privilégier ses intérêts personnels.
Conflits d’intérêts et polémiques
L’implication de Musk dans l’administration Trump a soulevé des questions éthiques, notamment en raison des conflits d’intérêts potentiels. En tant que PDG de Tesla, SpaceX et Neuralink, Musk supervisait des entreprises bénéficiant de contrats gouvernementaux massifs (plus de 8 milliards de dollars pour SpaceX seul). Des rapports indiquent que sous son influence, près de 90 enquêtes fédérales visant ses entreprises ont été suspendues ou abandonnées, notamment celles concernant la sécurité des technologies de conduite autonome de Tesla et les pratiques de Neuralink sur les tests animaux.
Cette proximité avec le pouvoir a également profité à Musk financièrement. Depuis l’élection de Trump, la valeur de Tesla a grimpé d’environ 30 %, et la cryptomonnaie Dogecoin, promue par Musk, a plus que doublé. Ces gains ont renforcé les critiques selon lesquelles Musk utilisait sa position pour favoriser ses entreprises, au détriment des intérêts publics.
Un départ pour se recentrer sur ses entreprises
Alors que son mandat touche à sa fin, Musk a annoncé son intention de se concentrer à nouveau sur Tesla, SpaceX et X, ainsi que sur ses ambitions de conquête spatiale, notamment la colonisation de Mars. Dans un message publié sur X, il a défendu son action, affirmant que « le peuple a voté pour une réforme majeure du gouvernement ». Cependant, des observateurs, comme ceux du Parisien et de France24, qualifient son bilan de « médiocre », pointant du doigt un manque de résultats tangibles face aux promesses initiales.
Que retenir de ce passage ?
Le passage d’Elon Musk au sein du DOGE illustre à la fois son influence croissante dans la sphère politique et les limites de l’application de méthodes du secteur privé à la gestion publique. S’il a réussi à mettre en lumière certains gaspillages et à initier des discussions sur la réforme gouvernementale, les obstacles structurels, les résistances politiques et les controverses éthiques ont freiné ses ambitions. Comme le note un analyste dans The New York Times, Musk a dû « réviser ses attentes » face à la complexité du système fédéral.
Pour l’administration Trump, le DOGE reste une initiative symbolique de la volonté de « drainer le marais » de Washington, mais son impact à long terme dépendra de la mise en œuvre des recommandations par le Congrès et les agences fédérales. En attendant, Musk retourne à ses projets entrepreneuriaux, laissant derrière lui un débat animé sur la place des milliardaires dans la gouvernance publique.
